Le TGV... encore

2014 ne pouvait pas mourir sans que quelqu’un, quelque part, nous chante pour la ixième fois la ritournelle d’un TGV dans le corridor Québec-Windsor; l’article est paru dans le journal Le Devoir du 29 décembre.

Nous n’avons pas l’intention de faire une longue démonstration du peu d’intérêt d’un tel article. Mais nous aimerions partager très brièvement quelques éléments de réflexion.

Tout d’abord, chanter les mérites du TGV en invoquant l’Europe comme exemple c’est escamoter quelque peu la réalité. Cette réalité, c’est que le TGV coûte cher. À ce titre, l’exemple français est éloquent. Nous vous invitons à consulter quelques articles : Challenge (2011), France Soir (2012), La Tribune (2014).

Il faudrait également voir jusqu’à quel point le TGV français n’a pas représenté des subventions à peine voilées pour soutenir une industrie qui, sans les projets de l’État, ne serait peut-être pas viable. Cet article est à ce titre suggestif.

La réalité, c’est aussi que plusieurs pays européens ont fait d’autres choix, qui ont été quelque peu escamotés par l’obsession de la grande vitesse. La Suède par exemple, qui est un pays dont la démographie se compare à celle du Québec, a fait le choix du train à 200 km/h sur voie classique. Les Suédois roulent à une vitesse fort appréciable, pour une fraction du prix d'un TGV et sans délai.

D’autres vont invoquer le lancement du TGV californien, un projet de 68 milliards de dollars qui va s’échelonner sur 14 ans; la Californie, c'est pratiquement 39 millions d'habitants.

Les exemples de la Suède et de la Californie sont intéressants dans la mesure où il pose la question suivante : quel est, pour un corridor donné, le meilleur rapport coût/vitesse? La France, sur plusieurs corridors, voulait la vitesse absolue; elle en a payé le prix; même chose pour la Californie qui doit attendre encore 14 ans. La Suède a fait un compromis qui lui permet de rouler vite à peu de frais. Il existe donc plusieurs modèles qui pourraient nous inspirer.

D’autres enfin vont invoquer le modèle chinois. Certes, la Chine va de l’avant avec de nombreux projets de TGV, mais il faut rappeler que la Chine n’a pas beaucoup de contraintes (environnement, loi du travail, salaire minimum, coût du foncier, respect des communautés, etc.).

Non pas que le TGV soit un mauvais moyen de transport. Bien au contraire! Mais certaines études ont démontré que les conditions d’implantation d’un TGV sont particulièrement étroites. Et le corridor Québec-Windsor ne serait vraisemblablement pas en mesure de soutenir raisonnablement un TGV, comme l’a montré une étude commandée par le gouvernement de l’Ontario en 2010.

Contrairement à ce que suggère la mise en page de cet article du Devoir, la vraie nouvelle, ce n’est pas le rêve d’un TGV, mais ce qui semble être l’intention de VIA Rail de construire une voie dédiée entre Montréal et Toronto pour un train passager roulant à 160 km/h (lire à cet effet une conférence du président de VIA Rail).

N’est-il pas préférable de rouler dès aujourd’hui à 160 km/h plutôt que de rêver au TGV?

Auteur: 
Rémi Guertin Ph.D.
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